'Le public a le droit de savoir combien on paie, combien on pêche, comment et par qui'

Cette interview de Isabella Lovin, Ministre suédoise de la Coopération internationale, réalisée par Jedna Deida, a été publiée sur Mauriweb Info http://mauriweb.info/node/1549

Vous venez juste de terminer une visite en Mauritanie. Vous avez rencontré les hautes autorités mauritaniennes. Pouvez-vous nous dire ce qui a été examiné afin d'améliorer la coopération entre la Suède et la Mauritanie?

Oui, j'ai visité la Mauritanie pour assister à la Conférence du FiTI, où j'ai été invitée comme oratrice principale, en raison de mon engagement de longue date pour une pêche durable. Bien sûr, j'ai également rencontré des membres du gouvernement et le Président, discutant des relations entre la Suède et la Mauritanie. Nous avons un intérêt commun pour une pêche durable, et nous avons également discuté plus largement sur le développement durable, l'importance de la lutte contre la corruption et l'importance de la transparence ainsi que la liberté de la presse.

 Vous avec participé à la Conférence FiTi à Nouakchott. Que pensez-vous de cette Conférence et que peut-on attendre de tous les partenaires en matière de pêche pour améliorer les résultats du FiTi?

 Je pense qu'il est excellent que la Mauritanie prenne les devants dans cette initiative pour la transparence dans la pêche, où d’autres importants pays comme l'Indonésie et le Sénégal ont aussi adhéré. Ce qui maintenant doit être développé, ce sont les normes techniques du FiTI et j'attends de la nécessaire transparence dans au moins trois domaines : sur les paiements effectués, sur les captures et sur les accords dans le domaine de la pêche. Le public a le droit de savoir combien on paie, combien on pêche, comment et par qui. 

 Quels seraient les avantages concrets de la transparence dans les pêches africaines en ce qui concerne les activités de la pêche industrielle dans nos eaux?

 C’est très important pour deux raisons ; tout d'abord pour lutter contre la corruption. En publiant tous les accords permettant l’accès à la pêche, les termes des accords, les numéros OMI des bateaux impliqués, la société civile et des médias libres peuvent demander des comptes aux décideurs responsables. Deuxièmement, il est essentiel de préserver les ressources marines. Une transparence totale sur les prises est nécessaire pour faire des évaluations de stocks, et c’est aussi important pour les populations locales et les pêcheurs locaux qui devraient avoir un accès prioritaire aux poissons. C’est seulement s’il y a un excédent qui ne peut pas être pêché par les pêcheurs locaux, que la pêche peut être autorisée pour les flottes étrangères.

Pensez-vous qu'une initiative comme la FiTI répondra à nos attentes? 

 Cela dépendra de tous les intervenants qui participent. Il est trop tôt pour le dire.

Qu’est-ce qui est nécessaire pour s'assurer que cela ne devienne pas simplement un exercice de « blanchiment» pour les gouvernements africains, afin d’attirer davantage d'investissements étrangers sans changer les comportements opaques ?

 Ce qui est nécessaire, c’est le véritable engagement par les gouvernements et la pleine participation des acteurs de la société civile et les organisations extérieures. Il est également important de garder à l'esprit que les gouvernements gagnent à adopter la transparence et la durabilité- pour l'UE, c'est une condition pour les accords de pêche : l’UE négocie uniquement pour avoir accès au surplus de poissons, ce qui ne peut pas être pêché par les populations locales. Ensuite, les pays devront publier tous leurs accords, s'ils veulent un accord de pêche avec l'UE. C'est ce qui a changé avec la nouvelle politique de pêche commune de l’UE.

Vous avez été une des combattantes les plus impliquées, au niveau de l’UE, pour défendre la pêche responsable et durable sur les côtes africaines. Maintenant, en tant que Ministre suédoise de la coopération internationale, qu’est ce qui peut être promu pour aider les pêcheurs en Afrique?

 La Suède est engagée de plusieurs façons pour soutenir la recherche sur les pêches et le renforcement des capacités en Afrique. Nous voyons que la pêche est une source de revenus importante pour des millions de personnes et aussi une source importante de protéines - il faut éviter que tout soit détruit par la surpêche. C'est pourquoi nous incluons maintenant une gestion durable des pêches dans notre stratégie de coopération régionale pour l'Afrique.